- Tiens donc, voilà ce bon vieux Max !

Il avait à peine poussé la porte du bar que déjà, le gérant l’avait reconnu. Il était si connu que ça ? Bon, okay, il connaissait pas mal de monde quand il s’agissait de boire ou de faire la fête… Mais quand même ! M’enfin… Il n’allait pas s’en plaindre.

- Hey Gerry ! Comment va ? Tu me sers un verre ?

S’installant sur un des tabourets du comptoir, il observait le barman, qui ne servait pas un, mais deux verres de Gin. Quitte à faire plaisir à un ami, autant se faire plaisir en même temps… Il tendit son verre à Maxime, tout en continuant :

- Moi tu vois, ça change pas… Toujours le même bar, toujours les mêmes crapules qui viennent passer du bon temps dans le coin… Et toi, tu fais quoi ? La bête profite de son jour de repos ?

Ah oui, la « bête »… Max avait une sacré réputation dans ce bar, grâce à - ou à cause de - ce cher Gerry, qui se plaisait à commenter à voix haute les aventures de l’étudiant, avec ou sans l’accord de ce dernier, d’ailleurs… Il fallait dire que Gerry ne croisait pas beaucoup d’étudiants du genre de Max… Enfin… C’était à peu près le cas de n’importe qui, puisqu’il n’existait pas beaucoup d’étudiants du genre de Max, de toute façon. Max, c’était… indéfinissable.

- Mmh… Si on veut…

Lorsqu’il était avec Gerry, il était toujours un peu étrange… Enfin, pas plus que d’habitude, certes, mais il était différent. Parce que si lui, on le trouvait plutôt… expansif, il avait quand même trouvé pire que lui, en la personne de Gerry. Et donc, quand il était avec lui, c’était le barman qui tenait la conversation, et Max ne faisait que lui répondre, à certains moments… Je vous l’avais dit, que c‘était étrange.

- Tiens, les derniers chiffres de la bourse, j’ai pensé à toi, quand j’ai vu le nom de l’entreprise de ton père.

Il lui tendait un journal, dont Max se saisit, et auquel il porta la plus grande attention - et oui, malgré les apparences, Maxime Rutherford sait lire ! -, alors que Gerry allait s’occuper d’un autre client. Max avait l’air tout de suite beaucoup plus sérieux, et beaucoup moins… Max (comment ça, c’est pareil ?), quand il était plongé dans ces chiffres auxquels la plupart des gens ne comprenaient rien, mais qui pour lui, avaient vraiment du sens, et étaient même de la plus grande importance. A la limite, on aurait pu ne pas le reconnaître… Mais ça, il s’en fichait, comme de sa première cuite. Il se fichait qu’on le reconnaisse ou pas… Il se fichait de ce qu’on pouvait penser de lui… C’était aussi ça, Max.

- Ah… J’en connais un qui va s’amuser, ce soir.
- Mmh ?

Il avait à peine levé les yeux de ses chiffres, quand Gerry était revenu vers lui, les yeux rivés vers la porte.

- Vise un peu qui vient d’entrer.

Gerry était vraiment d’une délicatesse à toute épreuve ! Parfois, Max était désespéré par son cas… Parfois, seulement. Parce que hey, on parle quand même de Max. Si y’avait un cas de vraiment désespéré dans le coin, c’était lui, et personne d’autre… Bref.

Il avait visé celle qui venait d’entrer. Et pas qu’un peu. Ces formes parfaites moulées par une robe des plus provocantes ne pouvaient appartenir qu’à une seule personne. Et cette personne se dirigeait précisément vers lui, ce qui n’était pas du tout étonnant, connaissant ladite personne. En silence, il lui avait rendu son sourire, alors qu’Amy lui arrachait son journal des mains, après avoir déposé sur sa joue un de ces baisers dont elle seule avait le secret. Après réflexion, c’était beaucoup, beaucoup plus intéressant que les chiffres de la bourse… Non, en fait, oubliez la réflexion, puisqu’elle n’avait pas eu lieu. Quand Amy était dans les parages, surtout dans une tenue pareille, il était prêt à croire sans problèmes que deux plus deux faisaient cinq…

- Avec plaisir…

Voilà qui donnait le ton de la conversation. Ça, et le sourire dont elle avait accompagné ses paroles. Sans plus attendre, elle s’était assise sur le tabouret près du sien, et avait commandé une vodka à Gerry. Ce dernier s’exécuta, non sans un certain intérêt pour la conversation qui se déroulait sous ses yeux. Max, lui, était plongé dans l’une des parties les plus intéressantes de l’anatomie d’Amy - je parle de ses yeux, évidemment -, et ne voyait pas son ami qui aurait bien voulu être présenté à la charmante créature qui lui tenait compagnie… Plus tard, Gerry… Chacun son tour, tu veux ?

- Terriblement, miss Highmore… Il me semble d’ailleurs que nous avons du temps à rattraper…

Il lui adressa son plus beau regard, agrémenté de ce fameux sourire en coin qui faisait fondre les demoiselles. Oui, il s’était lancé dans ce petit jeu de séduction auquel ils avaient l’habitude de jouer tous les deux, bien qu’il savait déjà comment cela se terminerait… Tous les deux, ils le savaient très bien. Ils se connaissaient depuis assez longtemps pour ça…

Sans la quitter des yeux, il avait prit une nouvelle gorgée à son verre. Enfin... Ce n’était pas tout à fait volontaire, puisqu’il ne pouvait pas décoller son regard de - disons-le - ses magnifiques formes. Elle savait très bien comment les mettre en avant… Et elle savait combien ce cher Maxime appréciait la moindre de ses courbes.

- Et il faut croire que je vous ai manqué aussi, au vu de la tenue que vous arborez pour venir me tenir compagnie…
- Max, comment tu parles !? Tu vas faire fuir tous mes clients !

Levant un sourcil, le jeune homme se retourna vers le barman, qui venait tout bonnement de les interrompre… Nulle trace d’agacement dans son regard, juste une pointe de surprise, et d’étonnement.

- En parlant trop bien ?

Gerry ne répondit rien. Il était trop occupé à dévorer la demoiselle du regard…

- En tout cas, je suis toujours plus poli que toi… M’enfin puisque tu insistes, Amy, Gerry, Gerry, Amy…

Voilà, les présentations étaient faites, et Gerry semblait aussi fougueux qu’un jeune chien en liberté - rho l’image… Wouaf ! -. Max, quand à lui, levait les yeux au ciel. Ce cas irrécupérable était son ami… Si si… Faut bien s’entraider, entre cas irrécupérables…

- Enchanté, mademoiselle Amy !

Une chose était sûre, cette soirée promettait d’être… riche ! En quoi ? Mmh… Allez savoir…

Une chose était sûre : Amy savait comment lui parler. Elle le savait très bien, peut-être même un peu trop… Mais ça n’était pas comme si ça le dérangeait réellement… Honnêtement, l’idée qu’elle puisse faire ce qu’elle voulait de son corps… Comment ça aurait pu le déranger ? Hein ? Ce qui le dérangeait vraiment, sur le moment, c’était plutôt Gerry… Oui parce que le barman, aussi sympathique puisse-t-il être, ne cessait de les interrompre, et c’en était presque agaçant… Presque. On parle toujours de Max, je vous rappelle… Oui oui, le mec qui se fout un peu de tout ce qui se passe autour de lui… Celui-là même…

- Gerry, tu veux pas aller voir si y’a d’autres gazelles de libres ?

Dans le genre direct, on pouvait difficilement faire mieux - à l’échelle « Maxienne », je rappelle… -, et il adressa à son ami un regard lourd de sens, et lui sourit légèrement quand il répondait :

- Euh… ouais, désolé, je voulais pas déranger la bête…

Il n’y avait aucune ironie, dans ses paroles… Il était tout ce qu’il y avait de plus sérieux, et c’était ce qui rendait les choses encore plus drôles ! Enfin… Le sérieux qui rend les choses drôles, ça fait bizarre, mais vous avez l’habitude à force, non ? Ouais… C’est bien ce que je me disais…

Le barman les quitta, après avoir jeté un dernier regard nostalgique aux courbes généreuses d’Amy. Max eut un léger rire alors qu‘il s‘éloignait. Il avait encore des progrès à faire, niveau discrétion. Heureusement que ce genre de comportements ne dérangeaient en rien Amy…

- C’était Gerry… Pas très discret dans son genre, mais on l’aime quand même…

Il but une nouvelle gorgée à son verre - qui allait rapidement être vide, à force… -, et reporta à nouveau son attention sur la demoiselle, toujours aussi belle… - oui enfin, depuis cinq minutes, elle a pas trop eu le temps de changer, hein…

- On en était où ?

A ces mots, il lui adressa un regard des plus suggestifs… C’était à qui craquerait le premier. Et s’il était quasiment sûr de perdre à ce jeu - n’oublions pas face à qui il jouait -, il voulait au moins faire semblant d’essayer de résister…

Il faisait chaud, dans ce bar… Très chaud… Et si vous voulez mon avis, ce n’était pas que l’effet de l’été… Ni celui de l’alcool, ni celui de la musique, ni… Il reste quoi, là ? Ah oui, Amy. Une fois le barman parti, elle était passée à la vitesse supérieure, comme si Max n’avait pas déjà assez de mal comme ça… Et pourtant, il essaya quand même, de résister… Malgré la tête qui commençait déjà à lui tourner… Et malgré Amy qui s’était penchée vers lui, lui dévoilant de manière totalement volontaire son décolleté duquel il fut incapable de détacher son regard - on est Max, ou on ne l’est pas, hein… - La soirée promettait d’être… longue ! Voilà…

- Je vois ça, je vois ça…

Max ! Résiste !
Pourquoi est-ce qu’il tenait absolument à résister, déjà ? Il ne savait plus… C’est pas parce que deux et deux font cinq ? Ah non ? C’est pas pour ça ? Oups…

- Pourquoi tant de haine ?

Avec un sourire - et quelques difficultés -, il avait relevé les yeux, jusqu’à rencontrer ceux d’Amy, qui ne le lâchaient pas non plus, d‘ailleurs. Peut-être qu’il avait une chance, finalement ? Mince, très mince, mais il devait tenter le coup… Lentement, il se rapprocha d’elle, ne la quittant pas des yeux, jusqu’à ce que… sa main atteigne la bouteille de vodka qui se trouvait derrière le bar - il avait l’autorisation de Gerry, pour ce genre de pratique -… - enfin, pas celle de faire miroiter les filles sur un éventuel futur « craquage », mais celle de se servir directement derrière le bar…

- Un autre verre ?

Ouhhhh il était vilain, le Maxou… Mais en même temps, elle était pas tendre non plus, la Amy… Vous avez vu ce qu’elle lui faisait subir ? Une vraie torture… Si si, une vraie torture pour les yeux… Il se demandait encore comment il avait pu y survivre… C’était un vrai miracle de la nature… Comment ça, j’en fais trop ?