J’étais, littéralement, excitée comme une puce. C’est idiot, et je le sentais bien, car il ne s’agirait ni de la première ni de la dernière fois que j’assisterai à un concert de ce groupe pour lequel j’avais eu un véritable coup de cœur. Et pourtant, je ne tenais pas en place. Tant et si bien que Naomi n’avait pu me supporter plus longtemps et m’avait chassée de sa chambre, à grand renfort de coups de revue people ; je ne pouvais que la comprendre, il est difficile de se vernir les ongles de pied quand une furie entreprend de défoncer les lattes de votre lit en sautillant dessus comme si elle comptait réellement finir par s’envoler et transpercer le plafond. Malgré les hématomes légers qui parsemaient déjà ma peau trop délicate -je ne pouvais décemment pas blâmer Naomi pour cela, je marquais en effet très facilement- je continuais de chantonner gaiement dans les couloirs de la résidence. Si, à mon arrivée ici, je m’étais montrée très introvertie, à la limite de l’autisme, je ne réfrénais à présent plus mes ardeurs et peinait de plus en plus à cacher mes sautes d’humeur incessantes. Tout en continuant de pépier joyeusement, j’entre dans ma chambre, termine de préparer les quelques affaires que je comptais emmener, c’est à dire strictement ce qui était nécessaire, vital. Il était en effet grand temps que je mette un terme à cette relation malsaine et à sens unique que j’entretenais avec les accessoires futiles, et, bientôt, quand j’en aurais trouvé le courage, je jetterai toutes ces babioles que j’avais eu en cadeau dans mes happy meal il y a dix bonnes années de cela. On y croit.

Après bonnes minutes de recherches frénétiques, je finis par remettre la main sur mon portable, et constate que six sms ne demandent qu’à être lus. Dont deux de ma mère, l’un évoquant la croissance de son bonsaï, ces petits arbres japonais étonnants qui atteignent rarement une taille dépassant le mètre. L’autre étant composé de deux photos de paire de chaussures, mère se demandant laquelle elle devait choisir. Je pousse un soupir et passe aux messages suivants, arrêtant brusquement ma lecture en tombant sur celui de Megan ; elle arrive ! Toute fébrile, j’attrape en toute hâte ma veste qui trônait sur le dossier de ma chaise de bureau, saisit mon sac à la même allure et file hors de cette chambre sans prendre la peine de fermer à clef ; tant pis !

Je dévale les escaliers à toute vitesse, et arrive finalement en bas, étonnée de ne pas m’être pris la patte quelque part. Sans me pencher sur la question plus de temps, je quitte la résidence et m’installe sur le muret de l’entrée, guettant rapidement l’arrivée de Megan tout en vérifiant dans mon sac à main que je n’ai rien oublié. Mon billet, mes clefs, un cd de Van Halen pour le trajet, mes papiers, non tout semble y être…