La journée se termine. Presque. Encore quelques heures de mal au coeur avant que le sommeil ne me délivre de mon calvaire. Pour m'emmener vers des souffrances inconscientes, qui seront peut-être pires. Qui sait ? Je grimace. La vie n'est-elle alors jamais faite pour être heureux ? N'est-elle qu'une continuité de peines, à peine liées les unes aux autres. A quoi ça rime, bon sang ? Et puis, ce n'est pas comme si le monde autour de moi jouissait d'un boneur rare..La guerre, la famine, le réchauffement climatique, la pauvreté. On n'entend parler que de ça de nos jours. Et j'avouerai d'ailleurs que je contribue largement à cette complainte organisée. Parce qu'aussi stupide que cela peut paraître, je fais partie de ces quelques naïfs qui croient en un avenir meilleur, qui se battent pour lui.

Mais qui ne se battent qu'avec des mots, entraînant bien sûr que de rares et décevants résultants. Parce que la triste vérité aujourd'hui, c'est que plus personne ne s'arrête pour écouter. Tout le monde parle, à tord et à travers, mais plus personne ne s'écoute. Il ne reste plus aujourd'hui que quelques échos et résonnances, symbole d'une monde où la communication est à la dérive. Enfin, peut-être que c'est mieux comme ça finalement. Je ne sais plus trop.

L'impact qui suit le fil de mes pensées fait sursauter on coeur. Parce que cette voix, je ne la connais que trop bien. En l'espace de quelques secondes, mon enfance défile sous mes yeux et c'est presque étonnée que je découvre le visage de mon interlocuteur en relevant les yeux..Bien sûr, ça ne pouvait être .. Pourtant, tout coïncidait. La voix, le ton, les injures. Et mon coeur, se serrant dans ma poitrine. Mais le jeune homme en face de moi n'a rien à voir avec le père que j'ai perdu. Ou abandonné, je ne sais plus trop finalement. Sauf sa voix, bien sûr. Troublée par cette ressemblance inattendue, je bégaye quelques mots avant de me baisser pour ramasser les livres, tandis que le garçon continue de me fixer. Bientôt agacée par ses yeux sur mon cou, je relève la tête, prête à lui lancer une réplique singlante. Mais je me tais, interdite devant son air. Torturé, perdu. Confus. Et tellement torturé.