Suivre des études de psychologie n’était pas de tout repos. Et de temps à autres, Harlow regrettait sincèrement d’avoir repris ses études. Franchement, dans quoi venait-elle de s’embarquer ? Sa famille était friquée, il aurait simplement fallu qu’elle retourne chez elle, et elle n’aurait pas eu besoin de travailler. Elle se serait simplement laisser porter.

Accoudée sur sa table, le regard dans le vague, ça faisait déjà un bon quart d’heure que la jeune Caldwell avait totalement décroché du cours. Rêvassant à ce qu’elle aurait pu faire pendant tout ce temps, flânez sur Time Square, ou sans voir trop grand, même se balader dans Providence à rigueur, un être pour le moins désagréable vint la sortir de sa petite bulle. Sale con.

▬ Mlle Cladwell. Ce que je vous dis ne vous intéresse-t-il pas ?
▬ Hum ?

Elle détestait être prise de court, et encore moins qu’on la fasse chier. Harlow avait tendance à s’énerver assez vite, quitte à envoyer balader un professeur. Surtout que les mathématiques étaient loin de franchement l’amuser. Elle voulait faire psy, pas prof de maths.

▬ Franchement ? Non.

Son professeur lui désigna alors la porte d’entrée d’un geste de la main. Elle arqua un sourcil avant de prendre ses affaires et de se lever pour quitter la pièce.
Parcourant les couloirs de l’université, ses talons claquaient contre le sol, un bruit qui lui plaisait par-dessus tout, mais qui, aujourd’hui, ne l’excitait pas vraiment. Emmerdeur de prof. Tous les mêmes. C’était à cause de plusieurs couillons dans le genre qu’elle avait retapé sa dernière année de lycée. Prétextant qu’elle n’avait pas fourni assez d’efforts. Que des conneries… Certaines de ses « amies » étaient passées avec des moyennes nettement plus faibles que la sienne.
Après avoir traversé une allée, Harlow arriva au Manning Hall. Batiment particulièrement apprécié des élèves. Pas de salles de cours, pas de professeurs, le pied. S’installant sur le canapé de la salle de détente, la jeune femme s’alluma une cigarette. Certes, un lieu public, interdit de fumer… Mais comme pour pas mal d’autres choses, ça lui passait totalement au dessus.
Vautrée, plus qu’assise, dans le sofa, sa clope à la bouche, elle entendit des bruits de pas. Ne se redressant pas pour autant, ne cachant pas non plus sa cigarette, Harlow avait ses yeux rivés sur l’entrée de la petite pièce. C’est là qu’elle le vit. Cet abruti de Maxime Rutherford. Un véritable couillon dans ce genre. Le sourire aux lèvres, il se rapprocha de la jeune californienne, abordant comme à l’accoutumé, un visage froid et pas forcément aimable. Un abruti de première comme elle s’amusait à le clamer haut et fort… Et pourtant, elle devait reconnaître qu’elle n’était pas totalement insensible à ses charmes. Enfin, disons que ça, elle aurait du mal à l’admettre, même avec une quantité conséquente d’alcool.

▬ Etrange de ne pas te voir avec une blondasse siliconée au cul…

Provocation. Encore et toujours. Après tout il restait un de ces playboys de l’Université, qui cherchait à mettre toutes les filles dans son lit ! … Ce qui avait aussi le don de l’énerver. Hum, étrange.

Le « blondasse siliconée » n’était qu’une image à ses yeux. Certes, l’étudiante aurait pu être brune que ça n’aurait rien changé au jugement de la jeune Delta. Elle restait une pétasse superficielle. Quoique certains la qualifiait elle-même de pétasse superficielle. Pourquoi ? Parce qu’elle prenait les mecs pour des cons, qu’elle les jetait comme bon lui semblait et qu’elle était pétée de fric. Être bourré e fric signifiait pour une bonne majorité être porté sur tout ce qui est matériel… A vrai dire, pas plus que n’importe qui. La seule chose avec l’argent, c’est que, plus vous en avez, plus vous dépensez. Alors non, Harlow n’était pas superficiel. Pétasse ? Certainement pas. Garce ? Absolument. Tout ce comportement avait une origine, et bien entendu, une explication. La jeune Caldwell ne souhaitait pas s’attacher. Elle préférait nettement sa solitude aux relations compliquées qui impliquaient de la souffrance. Parce que partout où il y a de l’amour, il y a de la souffrance. C’est la solitude qui poussait Harlow dans les bras de tous ces mecs qu’elle ne connaissait pas. Mais c’était aussi cette tendre amie qui l’en séparait.
La solitude est certainement le meilleur ami de l'homme, pourtant tout le monde la fuit. Tout le monde fuit ce que chacun d'entre nous recherche au plus profond de soit. La solitude est le meilleur ami de l'homme, car elle est discrète, elle ne pose aucune question et se contente juste de rester à vos côtés dans les moments les plus critiques de votre vie. La solitude c'est le saint Graal de chaque homme et pourtant elle constitue aussi le pire ennemi du peuple. La solitude vous pousse au malêtre, la solitude vous pousse au malheur, la solitude vous pousse dehors, mais elle vous amène également à ne plus être seule. La solitude c'est le déclic qui vous fait prendre conscience de l'ennui qui vous entoure, du poids du monde sur vos épaules et de tout le reste. La solitude c'est ce qui vous fait changer de direction. Ce n'est pas le destin qui vous pousse dans les bras d'un parfait inconnu ou dans ceux que vous désirez plus que tout au monde, mais bel et bien la solitude. La solitude vous ronge de haut en bas, de mal en pire, elle vous contraint donc à passer à autre chose.

▬ Hum injuste ? Voyons Maxime… T’es un playboy ! T’as toujours une fille au cul ! Dit-elle moqueusement.

Harlow se leva, écrasant finalement sa cigarette dans le cendrier posé sur la table basse. Se dirigeant, comme le jeune Rutherford l’avait fait auparavant, vers le petit frigo, pour se prendre une bière. Attrapant un ouvre-bouteille, elle se débarrassa de la capsule en un rien de temps. S’approchant de Maxime, elle laissa glisser son doigt sur ses épaules, en passant derrière lui. Elle se pencha à son oreille pour lui glisser quelques mots.

▬ Oh… Désolée. Autant pour moi. Donc… tu les aimes brunes et naturelles ?

Son souffle arrivait dans le cou du jeune Playboy. Elle contait bien s’amuser avec lui. Après tout, ça pouvait s’avérer marrant. En règle générale, elle passait son temps à le faire chier. Un peu comme si elle voulait lui faire payer le fait de ne pas franchement s’intéresser à elle alors qu’il draguait toute l’université. Complexe la petite Californienne… Puisque dès qu’un mec l’approchait, elle l’envoyait balader. Sauf si elle en décidait autrement.